Epandage aérien des bananeraies : IMBROGLIO

 

L’épandage aérien est interdit par une directive de l’UE de 2009 dont les dispositions ont été transposées en droit interne à l’article L.253-8  du code rural et de la pêche maritime. Mais il est possible dans des conditions limitativement prévues et sous réserve d’un encadrement strict, en vertu d’un arrêté ministériel du 31 mai  2011, en l’absence de solution alternative, de déroger à l’interdiction pour une durée limitée.

Les bananeraies de Guadeloupe sont victimes de champignons, les cercosporioses  jaune et noire,  dont personne ne conteste qu’ils doivent être éradiqués.

Le préfet de Guadeloupe a autorisé en janvier 2012 la société « Les producteurs de la Guadeloupe » à  procéder à l’épandage aérien des bananeraies pour six mois. Cet arrêté a pris de court les environnementalistes qui n’ont pas présenté de recours en justice. Une pétition a toutefois recueilli de très nombreuses signatures…sans pour autant influencer les décideurs.

Un second arrêté,  en date du 13 juillet, a maintenu la dérogation pour une nouvelle période de six mois.

Cette décision n’a pas été du goût des défenseurs de l’environnement et de la santé de la population, rendus très vigilants par le précédent faux pas des autorités administratives à l’origine de l’affaire de la chlordécone. Quatre associations, SOS Environnement, Amazona, ASFA et IRETRA, ont attaqué l’arrêté devant le TA de Basse-Terre auquel  elles ont demandé de l’annuler et dans un 1er temps d’en suspendre l’exécution.

Elles ont eu gain de cause. La présidente du TA, par ordonnance du 3 octobre, a  prononcé la suspension de l’exécution de l’arrêté. L’arrêté préfectoral a ainsi été paralysé  et aucun épandage ne peut plus depuis cette date être pratiqué sous peine de sanctions pénales.

L’administration, volant au secours des planteurs qui auraient parfaitement pu prendre l’initiative d’un tel recours, s’est pourvue en cassation devant le Conseil d’Etat (CE) contre l’ordonnance du 3 octobre.

Toutefois, sans attendre l’issue de ce pourvoi qui n’a pas en lui-même de caractère suspensif, ni du recours en annulation pendant au TA, le préfet  a pris le 15 octobre un arrêté modificatif du précédent, maintenant la dérogation à l’interdiction de l’épandage aérien avec toutefois une réserve, celle que ne soit pas utilisé le banole.

Dans le même temps, le préfet  a saisi  le juge des référés du TA d’une demande tendant à ce qu’il soit mis fin à la suspension de l’exécution de l’arrêté du 13 juillet.  Curieuse manière de procéder que celle qui consiste à  permettre la reprise de l’épandage par un arrêté modificatif avant même que le juge n’ait statué sur le bienfondé de cette requête…et qui plus est, sans avoir au préalable divulgué ni exploité les contrôles effectués dans le cadre des campagnes d’épandage menées jusqu’ici.

La décision du CE, quel qu’en soit le sens, aurait un grand intérêt pour l’avenir. Mais  si le TA  juge le recours en annulation rapidement, le pourvoi deviendra en droit sans objet et le CE ne pourra  que prononcer un non lieu à statuer.

Pas dupes de la stratégie de l’administration, les défenseurs de l’environnement ont repris eux aussi le chemin du TA qui devra juger non seulement si la substitution de l’eau au banole suffit à rendre légal l’arrêté modifié mais aussi et d’abord si les conditions étaient réunies pour qu’une dérogation puisse être envisagée.

Le suspense durera peu : le juge des référés du TA se prononcera sur la demande du préfet (mettre fin à la suspension de l’exécution de l’arrêté du 13 juillet) et sur celle des défenseurs de l’environnement (suspendre l’exécution de l’arrêté du 15 octobre) vendredi prochain, 26 octobre.

Suite au prochain épisode : Rendez-vous après le 26 !

 

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