L’article 55 du Projet de loi de finances pour l’Outremer.

Voilà une polémique qui a fait les choux gras et pas uniquement des réseaux sociaux. Une de plus ! Et comme pour ne rien changer, elle démontre s’il en était besoin le peu de considération, de prise en compte des souhaits et des besoins exprimés par les élus d’outremer par le gouvernement !

L’article 55 du Projet de loi de finances pour l’Outremer prévoit un budget de 23 millions d’euros pour que « toute personne résidant en France métropolitaine justifiant d’un projet d’installation durable dans les outre-mer se verrait attribuer au titre de la continuité territoriale, une aide financière pour le transport, plus une allocation à installation ».

Il s’agit là, d’une demande issue du groupe LIOT qui souhaitait une aide au retour des Ultramarins dans leur territoire d’origine. Une demande qui s’inscrit dans le cadre des mesures à prendre contre le déclin démographique, d’une part et contre le vieillissement en facilitant l’installation de jeunes de préférence. Cette demande pourtant bien ciblée, correspondait aux besoins de nos territoires qui souffrent d’un vieillissement accéléré de leurs populations. Et Olivier SERVA de la LIOT d’indiquer et même d’insister : « On veut que ce soit uniquement des personnes qui ont des centres d’intérêt matériels et moraux en Outre-Mer. Mais je veux rajouter une autre condition encore plus restrictive. Je veux que cette mesure ne concerne que les personnes qui ont bénéficié d’un passeport aller de Ladom. En clair, par exemple, c’est un étudiant né en Guadeloupe par exemple qui a bénéficié d’un passeport pour aller étudier en France hexagonale et il veut revenir ».

Mais voilà, et dans la récidive, le ministre délégué aux outremers a fait de nouveau montre de son ignorance, certains disent de son mépris, comme pour « l’eau bouillie », envers les outremers.

Il était pourtant simple de recadrer en une ligne cette aide et éviter toute dérive discriminante, afin qu’elle corresponde aux besoins exprimés par les élus ultramarins. Il suffisait en effet de faire référence aux intérêts matériels et moraux dans les outremers des personnes bénéficiaires. Une mesure d’autant plus évidente que c’est une règle qui existe, et qui est mise en pratique régulièrement dans l’Éducation Nationale, dans la police ou d’autres administrations. Mais dans ce cas précis, la demande des élus concerne plus généralement les personnes issues du privé et non des administrations.

Il est fort de café pour le ministre de ne pas comprendre que son texte était la porte ouverte à un Bumidom à l’envers. Ce que Césaire a eu à dénoncer depuis longtemps comme un génocide par substitution !

Par conséquent, il ne pouvait pas ignorer que sa mesure allait à l’encontre de ce qui lui était demandé. Et que les réactions auraient été vives.

Choqués, même des députés issus de la majorité présidentielle ont manifesté leur désaccord avec ce texte.

Cette mesure, sortie du chapeau de la première ministre Elisabeth BORNE est d’autant plus surprenante qu’elle n’avait jamais été évoquée lors du récent CIOM (conseil interministériel aux outremers).

L’attitude et la radicalité du ministre qui a refusé toute discussion de ce texte, laissent un goût amer aux députés ultramarins, surtout ceux qui avaient mis sur la table l’idée d’une aide au retour. Olivier SERVA rajoutait « Il n’est pas question qu’il fasse passer quelque chose qui ne correspond pas aux desiderata de la population ultramarine et qui fasse entrer en Outre-Mer des gens sans attache venus investir avec l’argent de l’État ».

Car on ne peut laisser à chaque Région la prise en charge des aides spécifiques à leurs ressortissants. Il y aurait ici une discrimination en fonction de l’intérêt et de la richesse de chacune.

Les réactions ont été virulentes voire éruptives. Déjà à l’Assemblée nationale le député Martiniquais Jean-Philippe NILOR qualifiait cette aide de « colonisation par repeuplement de nos territoires pour toute personne résidant dans l’Hexagone ».

En Guadeloupe le CIPN allait jusqu’à mettre cet article 55 en parallèle avec l’article 55 du Code Noir.

De son côté Alain PLAISIR du CIPPA, arguait que cette mesure ressemble à la prime d’éloignement qui était accordée aux métros qui venaient dans les DOM. Il réitérait sa proposition de changer de statut pour l’article 74 et jusqu’au statut de PTOM comme St-Barth. Car pour lui, il n’est pas possible de mettre en place des mesures ciblées dans le statut actuel.

On voit donc à travers cet article qui risque bien d’être adopté avec le « couperet du 49-3 faisant adopter globalement le budget que le chemin est encore long pour parvenir à une gouvernance apaisée et intelligente. La méfiance des Ultramarins — victimes de contentieux lourds comme le BUBIDOM, la chlordécone, l’égalité réelle, l’eau — est croissante envers le pouvoir parisien. Avec un gouvernement autiste, empêtré dans une vision franco-parisienne, autoritaire voire décalée des réalités des territoires ultramarins, difficile de croire en la promesse d’un avenir meilleur.

RJC

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